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Émile Zola

Émile Zola






Émile Zola, 1899



"...quand on enferme la vérité sous terre, elle s’y amasse, elle y prend une force telle d’explosion, que, le jour où elle éclate, elle fait tout sauter avec elle..."

"...Wenn man die Wahrheit begräbt, ballt sie sich zusammen und gewinnt eine solche Sprenggewalt, dass sie an dem Tage, an welchem sie sich durchsetzt, alles mit sich in die Luft reißt..."

"...when truth is buried underground, it grows and it builds up so much force that the day it explodes it blasts everything with it..."

***


J’Accuse ...!


 « J'Accuse » est un exemple de Journalisme et d'expression publique courageuse. En attaquant ouvertement les abus de pouvoir, l'arbitraire et le racisme, le Haut Commandement de l’Armée, qu’il accuse de pervertir la « Justice », tout en s’exposant aux représailles inévitables, Emile Zola donne une nouvelle dimension à l'affaire Dreyfus, qui devient l'Affaire et qui mènera la France au bord du gouffre.

Publiée le 13 janvier 1898 dans le journal parisien « L'Aurore », « J’Accuse ! » est une lettre ouverte à Félix Faure, alors président de la République française, qui ébranla les fondements de la Troisième République. Publiée à la Une, l’article fît sensation tant en France qu’à l'étranger et est le véritable début de l'affaire Dreyfus. « J'Accuse » ! apporte pour la première fois la réunion de toutes les données existantes sur l'Affaire. Par les accusations, proférés dans l'article, Emile Zola s’expose volontairement, afin de forcer les autorités à le traduire en justice. Son procès servirait d'occasion pour un nouvel examen public des cas Dreyfus et Esterhazy. 
Dès le 15 janvier, Le Temps publie une pétition réclamant la révision du procès. Parmi les noms des signataires figurent entres autres les noms d'Émile Zola, Anatole France, le directeur de l'Institut Pasteur Émile Duclaux, Daniel Halévy, Fernand Gregh, Félix Fénéon, Marcel Proust, Lucien Herr, Charles Andler, Victor Bérard, François Simiand, Georges Sorel, le peintre Claude Monet, l'écrivain Jules Renard, le sociologue Émile Durkheim, l'historien Gabriel Monod, etc.

Le 20 janvier, c’est à la Chambre des députés que le vent se lève, à la suite d'une intervention de l'élu catholique Albert de Mun contre Zola, celle-ci décide les poursuites par 312 voix contre 122. Dans L'Aurore du 23 janvier, Clemenceau, au nom d'une « pacifique révolte de l'esprit français », reprend positivement le terme d’« intellectuels ». Le 1 février, c’est Barrès qui fustige ceux-ci dans le Journal, le 19 janvier, les députés socialistes prennent eux leurs distances face aux « deux factions bourgeoises rivales ».
Le but fut atteint, le 18 janvier, le général Billot, ministre de la Guerre, porte plainte contre Emile Zola et Alexandre Perrenx, le gérant de L'Aurore, pour calomnie et diffamation. 
La diffamation envers une autorité publique étant alors passible des Assises, le procès aura donc lieu en public. Pourtant, malgré toutes les accusations proférées par Emile Zola, la justice ne retiendra que trois passages de l'article, soit dix-huit lignes sur plusieurs centaines. Il est, notamment reproché à Zola d'avoir écrit que le Conseil de guerre avait commis une « illégalité par ordre ». Le ministère de la Guerre faisant apparemment tout pour éviter une réouverture du procès contre Alfred Dreyfus. 

Le procès qui passe devant les Assises de la Seine du 7 au 23 février 1898, s'ouvre dans une ambiance de grande violence, non seulement orale : Zola fait l'objet d'insultes, mais il a également de nombreux soutiens. 
Maître Fernand Labori, l'avocat de Zola, fait citer prêts de deux cents témoins, l’affaire Dreyfus, qui jusqu’à présent avait été traitée sous le sceau du secret, explose au grand jour, les réalités de l’affaire, les entourloupes, les manipulations, en grande partie inconnue du grand public, sont diffusées dans la presse. 
Entre Dreyfusards et Anti-Dreyfusards la guerre est ouverte. Dans la presse les affrontements atteignent une dimension et une violence jusqu’ici inconnue. Un fossé grandissant journellement divise la France en deux, la ligne de rupture restera plus ou moins la même quelques années plus tard, quand la question de la séparation de l’église et de l’état sera l’enjeux politique.
De nombreux journaux suivent l’Aurore dans son combat. L’Aurore publie, au jour le jour, des notes sténographiques « in extensio » des débats, et ces notes sont édifiantes.


Dans les rangs des Anti-Dreyfusards l’on fulmine. Les Antisémites, les nationalistes, derrière Henri Rochefort, organisent des émeutes, forçant le préfet de police à intervenir afin de protéger les sorties de Zola, à chaque audience.

La République vacille, la France est au bord de la guerre civile… 



***



"Lettre à M. Félix Faure,

Président de la République



Monsieur le Président,


Me permettez-vous, dans ma gratitude pour le bienveillant accueil que vous m’avez fait un jour, d’avoir le souci de votre juste gloire et de vous dire que votre étoile, si heureuse jusqu’ici, est menacée de la plus honteuse, de la plus ineffaçable des taches ? Vous êtes sorti sain et sauf des basses calomnies, vous avez conquis les coeurs. Vous apparaissez rayonnant dans l’apothéose de cette fête patriotique que l’alliance russe a été pour la France, et vous vous préparez à présider au solennel triomphe de notre Exposition Universelle, qui couronnera notre grand siècle de travail, de vérité et de liberté. Mais quelle tache de boue sur votre nom - j’allais dire sur votre règne - que cette abominable affaire Dreyfus!

Un conseil de guerre vient, par ordre, d’oser acquitter un Esterhazy, soufflet suprême à toute vérité, à toute justice. Et c’est fini, la France a sur la joue cette souillure, l’histoire écrira que c’est sous votre présidence qu’un tel crime social a pu être commis. Puisqu’ils ont osé, j’oserai aussi, moi. La vérité, je la dirai, car j’ai promis de la dire, si la justice, régulièrement saisie, ne la faisait pas, pleine et entière. Mon devoir est de parler, je ne veux pas être complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de l’innocent qui expie là-bas, dans la plus affreuse des tortures, un crime qu’il n’a pas commis. Et c’est à vous, monsieur le Président, que je la crierai, cette vérité, de toute la force de ma révolte d’honnête homme. Pour votre honneur, je suis convaincu que vous l’ignorez. Et à qui donc dénoncerai-je la tourbe malfaisante des vrais coupables, si ce n’est à vous, le premier magistrat du pays ?
La vérité d’abord sur le procès et sur la condamnation de Dreyfus. Un homme néfaste a tout mené, a tout fait, c’est le lieutenant-colonel du Paty de Clam, alors simple commandant. Il est l’affaire Dreyfus tout entière; on ne la connaîtra que lorsqu’une enquête loyale aura établi nettement ses actes et ses responsabilités. Il apparaît comme l’esprit le plus fumeux, le plus compliqué, hanté d’intrigues romanesques, se complaisant aux moyens des romans-feuilletons, les papiers volés, les lettres anonymes, les rendez-vous dans les endroits déserts, les femmes mystérieuses qui colportent, de nuit, des preuves accablantes. C’est lui qui imagina de dicter le bordereau à Dreyfus; c’est lui qui rêva de l’étudier dans une pièce entièrement revêtue de glaces; c’est lui que le commandant Forzinetti nous représente armé d’une lanterne sourde, voulant se faire introduire près de l’accusé endormi, pour projeter sur son visage un brusque flot de lumière et surprendre ainsi son crime, dans l’émoi du réveil. Et je n’ai pas à tout dire, qu’on cherche, on trouvera.
Je déclare simplement que le commandant du Paty de Clam, chargé d’instruire l’affaire Dreyfus, comme officier judiciaire, est, dans l’ordre des dates et des responsabilités, le premier coupable de l’effroyable erreur judiciaire qui a été commise. Le bordereau était depuis quelque temps déjà entre les mains du colonel Sandherr, directeur du bureau des renseignements, mort depuis de paralysie générale. Des «fuites» avaient lieu, des papiers disparaissaient, comme il en disparaît aujourd’hui encore; et l’auteur du bordereau était recherché, lorsqu’un a priori se fit peu à peu que cet auteur ne pouvait être qu’un officier de l’état-major, et un officier d’artillerie: double erreur manifeste, qui montre avec quel esprit superficiel on avait étudié ce bordereau, car un examen raisonné démontre qu’il ne pouvait s’agir que d’un officier de troupe.
On cherchait donc dans la maison, on examinait les écritures, c’était comme une affaire de famille, un traître à surprendre dans les bureaux mêmes, pour l’en expulser. Et, sans que je veuille refaire ici une histoire connue en partie, le commandant du Paty de Clam entre en scène, dès qu’un premier soupçon tombe sur Dreyfus. A partir de ce moment, c’est lui qui a inventé Dreyfus, l’affaire devient son affaire, il se fait fort de confondre le traître, de l’amener à des aveux complets.
Il y a bien le ministre de la Guerre, le général Mercier, dont l’intelligence semble médiocre ; il y a bien le chef de l’état-major, le général de Boisdeffre, qui paraît avoir cédé à sa passion cléricale, et le sous-chef de l’état-major, le général Gonse, dont la conscience a pu s’accommoder de beaucoup de choses. Mais, au fond, il n’y a d’abord que le commandant du Paty de Clam, qui les mène tous, qui les hypnotise, car il s’occupe aussi de spiritisme, d’occultisme, il converse avec les esprits.
On ne saurait concevoir les expériences auxquelles il a soumis le malheureux Dreyfus, les pièges dans lesquels il a voulu le faire tomber, les enquêtes folles, les imaginations monstrueuses, toute une démence torturante. Ah ! cette première affaire, elle est un cauchemar, pour qui la connaît dans ses détails vrais ! Le commandant du Paty de Clam arrête Dreyfus, le met au secret. Il court chez madame Dreyfus, la terrorise, lui dit que, si elle parle, son mari est perdu. Pendant ce temps, le malheureux s’arrachait la chair, hurlait son innocence. Et l’instruction a été faite ainsi, comme dans une chronique du XVe siècle, au milieu du mystère, avec une complication d’expédients farouches, tout cela basé sur une seule charge enfantine, ce bordereau imbécile, qui n’était pas seulement une trahison vulgaire, qui était aussi la plus impudente des escroqueries, car les fameux secrets livrés se trouvaient presque tous sans valeur.
Si j’insiste, c’est que l’oeuf est ici, d’où va sortir plus tard le vrai crime, l’épouvantable déni de justice dont la France est malade. Je voudrais faire toucher du doigt comment l’erreur judiciaire a pu être possible, comment elle est née des machinations du commandant du Paty de Clam, comment le général Mercier, les généraux de Boisdeffre et Gonse ont pu s’y laisser prendre, engager peu à peu leur responsabilité dans cette erreur, qu’ils ont cru devoir, plus tard, imposer comme la vérité sainte, une vérité qui ne se discute même pas. Au début, il n’y a donc, de leur part, que de l’incurie et de l’inintelligence. Tout au plus, les sent-on céder aux passions religieuses du milieu et aux préjugés de l’esprit de corps. Ils ont laissé faire la sottise.
Mais voici Dreyfus devant le conseil de guerre. Le huis clos le plus absolu est exigé. Un traître aurait ouvert la frontière à l’ennemi pour conduire l’empereur allemand jusqu’à Notre-Dame, qu’on ne prendrait pas des mesures de silence et de mystère plus étroites. La nation est frappée de stupeur, on chuchote des faits terribles, de ces trahisons monstrueuses qui indignent l’Histoire ; et naturellement la nation s’incline. Il n’y a pas de châtiment assez sévère, elle applaudira à la dégradation publique, elle voudra que le coupable reste sur son rocher d’infamie, dévoré par le remords. Est-ce donc vrai, les choses indicibles, les choses dangereuses, capables de mettre l’Europe en flammes, qu’on a dû enterrer soigneusement derrière ce huis clos?
Non! il n’y a eu, derrière, que les imaginations romanesques et démentes du commandant du Paty de Clam. Tout cela n’a été fait que pour cacher le plus saugrenu des romans-feuilletons. Et il suffit, pour s’en assurer, d’étudier attentivement l’acte d’accusation, lu devant le conseil de guerre. Ah! le néant de cet acte d’accusation ! Qu’un homme ait pu être condamné sur cet acte, c’est un prodige d’iniquité.
Je défie les honnêtes gens de le lire, sans que leur coeurs bondisse d’indignation et crie leur révolte, en pensant à l’expiation démesurée, là-bas, à l’île du Diable. Dreyfus sait plusieurs langues, crime ; on n’a trouvé chez lui aucun papier compromettant, crime ; il va parfois dans son pays d’origine, crime ; il est laborieux, il a le souci de tout savoir, crime ; il ne se trouble pas, crime ; il se trouble, crime. Et les naïvetés de rédaction, les formelles assertions dans le vide!
On nous avait parlé de quatorze chefs d’accusation : nous n’en trouvons qu’une seule en fin de compte, celle du bordereau ; et nous apprenons même que les experts n’étaient pas d’accord, qu’un d’eux, M. Gobert, a été bousculé militairement, parce qu’il se permettait de ne pas conclure dans le sens désiré. On parlait aussi de vingt-trois officiers qui étaient venus accabler Dreyfus de leurs témoignages.
Nous ignorons encore leurs interrogatoires, mais il est certain que tous ne l’avaient pas chargé ; et il est à remarquer, en outre, que tous appartenaient aux bureaux de la guerre. C’est un procès de famille, on est là entre soi, et il faut s’en souvenir : l’état-major a voulu le procès, l’a jugé, et il vient de le juger une seconde fois. Donc, il ne restait que le bordereau, sur lequel les experts ne s’étaient pas entendus.
On raconte que, dans la chambre du conseil, les juges allaient naturellement acquitter. Et, dès lors, comme l’on comprend l’obstination désespérée avec laquelle, pour justifier la condamnation, on affirme aujourd’hui l’existence d’une pièce secrète, accablante, la pièce qu’on ne peut montrer, qui légitime tout, devant laquelle nous devons nous incliner, le bon Dieu invisible et inconnaissable ! Je la nie, cette pièce, je la nie de toute ma puissance ! Une pièce ridicule, oui, peut-être la pièce où il est question de petites femmes, et où il est parlé d’un certain D... qui devient trop exigeant : quelque mari sans doute trouvant qu’on ne lui payait pas sa femme assez cher.
Mais une pièce intéressant la défense nationale, qu’on ne saurait produire sans que la guerre fût déclarée demain, non, non ! C’est un mensonge ! et cela est d’autant plus odieux et cynique qu’ils mentent impunément sans qu’on puisse les en convaincre.
Ils ameutent la France, ils se cachent derrière sa légitime émotion, ils ferment les bouches en troublant les cœurs, en pervertissant les esprits. Je ne connais pas de plus grand crime civique.
Voilà donc, monsieur le Président, les faits qui expliquent comment une erreur judiciaire a pu être commise ; et les preuves morales, la situation de fortune de Dreyfus, l’absence de motifs, son continuel cri d’innocence, achèvent de le montrer comme une victime des extraordinaires imaginations du commandant du Paty de Clam, du milieu clérical où il se trouvait, de la chasse aux « sales juifs », qui déshonore notre époque.
Et nous arrivons à l’affaire Esterhazy. Trois ans se sont passés, beaucoup de consciences restent troublées profondément, s’inquiètent, cherchent, finissent par se convaincre de l’innocence de Dreyfus. Je ne ferai pas l’historique des doutes, puis de la conviction de M. Scheurer-Kestner.
Mais, pendant qu’il fouillait de son côté, il se passait des faits graves à l’état-major même. Le colonel Sandherr était mort, et le lieutenant-colonel Picquart lui avait succédé comme chef du bureau des renseignements. Et c’est à ce titre, dans l’exercice de ses fonctions, que ce dernier eut un jour entre les mains une lettre-télégramme, adressée au commandant Esterhazy, par un agent d’une puissance étrangère.
Son devoir strict était d’ouvrir une enquête. La certitude est qu’il n’a jamais agi en dehors de la volonté de ses supérieurs. Il soumit donc ses soupçons à ses supérieurs hiérarchiques, le général Gonse, puis le général de Boisdeffre, puis le général Billot, qui avait succédé au général Mercier comme ministre de la Guerre. Le fameux dossier Picquart, dont il a été tant parlé, n’a jamais été que le dossier Billot, j’entends le dossier fait par un subordonné pour son ministre, le dossier qui doit exister encore au ministère de la Guerre. Les recherches durèrent de mai à septembre 1896, et ce qu’il faut affirmer bien haut, c’est que le général Gonse était convaincu de la culpabilité d’Esterhazy, c’est que le général de Boisdeffre et le général Billot ne mettaient pas en doute que le bordereau ne fût de l’écriture d’Esterhazy.
L’enquête du lieutenant-colonel Picquart avait abouti à cette constatation certaine. Mais l’émoi était grand, car la condamnation d’Esterhazy entraînait inévitablement la révision du procès Dreyfus; et c’était ce que l’état-major ne voulait à aucun prix. Il dut y avoir là une minute psychologique pleine d’angoisse. Remarquez que le général Billot n’était compromis dans rien, il arrivait tout frais, il pouvait faire la vérité. Il n’osa pas, dans la terreur sans doute de l’opinion publique, certainement aussi dans la crainte de livrer tout l’état-major, le général de Boisdeffre, le général Gonse, sans compter les sous-ordres.
Puis, ce ne fut là qu’une minute de combat entre sa conscience et ce qu’il croyait être l’intérêt militaire. Quand cette minute fut passée, il était déjà trop tard. Il s’était engagé, il était compromis. Et, depuis lors, sa responsabilité n’a fait que grandir, il a pris à sa charge le crime des autres, il est aussi coupable que les autres, il est plus coupable qu’eux, car il a été le maître de faire justice, et il n’a rien fait.
Comprenez-vous cela ! Voici un an que le général Billot, que les généraux de Boisdeffre et Gonse savent que Dreyfus est innocent, et ils ont gardé pour eux cette effroyable chose ! Et ces gens-là dorment, et ils ont des femmes et des enfants qu’ils aiment ! Le lieutenant-colonel Picquart avait rempli son devoir d’honnête homme. Il insistait auprès de ses supérieurs, au nom de la justice. Il les suppliait même, il leur disait combien leurs délais étaient impolitiques, devant le terrible orage qui s’amoncelait, qui devait éclater, lorsque la vérité serait connue.
Ce fut, plus tard, le langage que M. Scheurer- Kestner tint également au général Billot, l’adjurant par patriotisme de prendre en main l’affaire, de ne pas la laisser s’aggraver, au point de devenir un désastre public.
Non! Le crime était commis, l’état-major ne pouvait plus avouer son crime. Et le lieutenant-colonel Picquart fut envoyé en mission, on l’éloigna de plus en plus loin, jusqu’en Tunisie, où l’on voulut même un jour honorer sa bravoure, en le chargeant d’une mission qui l’aurait sûrement fait massacrer, dans les parages où le marquis de Morès a trouvé la mort. Il n’était pas en disgrâce, le général Gonse entretenait avec lui une correspondance amicale.
Seulement, il est des secrets qu’il ne fait pas bon d’avoir surpris. A Paris, la vérité marchait, irrésistible, et l’on sait de quelle façon l’orage attendu éclata. M. Mathieu Dreyfus dénonça le commandant Esterhazy comme le véritable auteur du bordereau, au moment où M. Scheurer-Kestner allait déposer, entre les mains du garde des Sceaux, une demande en révision du procès.

Et c’est ici que le commandant Esterhazy paraît. Des témoignages le montrent d’abord affolé, prêt au suicide ou à la fuite. Puis, tout d’un coup, il paye d’audace, il étonne Paris par la violence de son attitude. C’est que du secours lui était venu, il avait reçu une lettre anonyme l’avertissant des menées de ses ennemis, une dame mystérieuse s’était même dérangée de nuit pour lui remettre une pièce volée à l’état-major, qui devait le sauver. Et je ne puis m’empêcher de retrouver là le lieutenant-colonel du Paty de Clam, en reconnaissant les expédients de son imagination fertile.
Son œuvre, la culpabilité de Dreyfus, était en péril, et il a voulu sûrement défendre son oeuvre. La révision du procès, mais c’était l’écroulement du roman- feuilleton si extravagant, si tragique, dont le dénouement abominable a lieu à l’île du Diable! C’est ce qu’il ne pouvait permettre.

Dès lors, le duel va avoir lieu entre le lieutenant-colonel Picquart et le lieutenant-colonel du Paty de Clam, l’un le visage découvert, l’autre masqué. on les retrouvera prochainement tous deux devant la justice civile. Au fond, c’est toujours l’état-major qui se défend, qui ne veut pas avouer son crime, dont l’abomination grandit d’heure en heure.
On s’est demandé avec stupeur quels étaient les protecteurs du commandant Esterhazy. C’est d’abord, dans l’ombre, le lieutenant-colonel du Paty de Clam qui a tout machiné, qui a tout conduit. Sa main se trahit aux moyens saugrenus.
Puis, c’est le général de Boisdeffre, c’est le général Gonse, c’est le général Billot lui-même, qui sont bien obligés de faire acquitter le commandant, puisqu’ils ne peuvent laisser reconnaître l’innocence de Dreyfus, sans que les bureaux de la guerre croulent dans le mépris public. Et le beau résultat de cette situation prodigieuse est que l’honnête homme, là- dedans, le lieutenant-colonel Picquart, qui seul a fait son devoir, va être la victime, celui qu’on bafouera et qu’on punira.
Ô justice, quelle affreuse désespérance serre le cœur ! On va jusqu’à dire que c’est lui le faussaire, qu’il a fabriqué la carte-télégramme pour perdre Esterhazy. Mais, grand Dieu! pourquoi ? dans quel but ? donnez un motif. Est-ce que celui-là aussi est payé par les juifs ? Le joli de l’histoire est qu’il était justement antisémite. Oui ! nous assistons à ce spectacle infâme, des hommes perdus de dettes et de crimes dont on proclame l’innocence, tandis qu’on frappe l’honneur même, un homme à la vie sans tache ! Quand une société en est là, elle tombe en décomposition.
Voilà donc, monsieur le Président, l’affaire Esterhazy : un coupable qu’il s’agissait d’innocenter. Depuis bientôt deux mois, nous pouvons suivre heure par heure la belle besogne.
J’abrège, car ce n’est ici, en gros, que le résumé de l’histoire dont les brûlantes pages seront un jour écrites tout au long. Et nous avons donc vu le général de Pellieux, puis le commandant Ravary, conduire une enquête scélérate d’où les coquins sortent transfigurés et les honnêtes gens salis. Puis, on a convoqué le conseil de guerre.

Comment a-t-on pu espérer qu’un conseil de guerre déferait ce qu’un conseil de guerre avait fait ? Je ne parle même pas du choix toujours possible des juges. L’idée supérieure de discipline, qui est dans le sang de ces soldats, ne suffit-elle à infirmer leur pouvoir d’équité ? Qui dit discipline dit obéissance.
Lorsque le ministre de la Guerre, le grand chef, a établi publiquement, aux acclamations de la représentation nationale, l’autorité de la chose jugée, vous voulez qu’un conseil de guerre lui donne un formel démenti ? Hiérarchiquement, cela est impossible. Le général Billot a suggestionné les juges par sa déclaration, et ils ont jugé comme ils doivent aller au feu, sans raisonner.
L’opinion préconçue qu’ils ont apportée sur leur siège, est évidemment celle-ci :
« Dreyfus a été condamné pour crime de trahison par un conseil de guerre, il est donc coupable ; et nous, conseil de guerre, nous ne pouvons le déclarer innocent ; or nous savons que reconnaître la culpabilité d’Esterhazy, ce serait proclamer l’innocence de Dreyfus. » 
Rien ne pouvait les faire sortir de là. Ils ont rendu une sentence inique, qui à jamais pèsera sur nos conseils de guerre, qui entachera désormais de suspicion tous leurs arrêts. Le premier conseil de guerre a pu être inintelligent, le second est forcément criminel. Son excuse, je le répète, est que le chef suprême avait parlé, déclarant la chose jugée inattaquable, sainte et supérieure aux hommes, de sorte que des inférieurs ne pouvaient dire le contraire.
On nous parle de l’honneur de l’armée, on veut que nous l’aimions, la respections. Ah! certes, oui, l’armée qui se lèverait à la première menace, qui défendrait la terre française, elle est tout le peuple, et nous n’avons pour elle que tendresse et respect. Mais il ne s’agit pas d’elle, dont nous voulons justement la dignité, dans notre besoin de justice. Il s’agit du sabre, le maître qu’on nous donnera demain peut-être. Et baiser dévotement la poignée du sabre, le dieu, non !
Je l’ai démontré d’autre part: l’affaire Dreyfus était l’affaire des bureaux de la guerre, un officier de l’état-major, dénoncé par ses camarades de l’état-major, condamné sous la pression des chefs de l’état-major. Encore une fois, il ne peut revenir innocent sans que tout l’état-major soit coupable. Aussi les bureaux, par tous les moyens imaginables, par des campagnes de presse, par des communications, par des influences, n’ont-ils couvert Esterhazy que pour perdre une seconde fois Dreyfus.
Quel coup de balai le gouvernement républicain devrait donner dans cette jésuitière, ainsi que les appelle le général Billot lui-même !
Où est-il, le ministère vraiment fort et d’un patriotisme sage, qui osera tout y refondre et tout y renouveler ?
Que de gens je connais qui, devant une guerre possible, tremblent d’angoisse, en sachant dans quelles mains est la défense nationale !
Et quel nid de basses intrigues, de commérages et de dilapidations, est devenu cet asile sacré, où se décide le sort de la patrie !
On s’épouvante devant le jour terrible que vient d’y jeter l’affaire Dreyfus, ce sacrifice humain d’un malheureux, d’un « sale juif » !
Ah ! tout ce qui s’est agité là de démence et de sottise, des imaginations folles, des pratiques de basse police, des moeurs d’inquisition et de tyrannie, le bon plaisir de quelques galonnés mettant leurs bottes sur la nation, lui rentrant dans la gorge son cri de vérité et de justice, sous le prétexte menteur et sacrilège de la raison d’État !
Et c’est un crime encore que de s’être appuyé sur la presse immonde, que de s’être laissé défendre par toute la fripouille de Paris, de sorte que voilà la fripouille qui triomphe insolemment, dans la défaite du droit et de la simple probité.
C’est un crime d’avoir accusé de troubler la France ceux qui la veulent généreuse, à la tête des nations libres et justes, lorsqu’on ourdit soi-même l’impudent complot d’imposer l’erreur, devant le monde entier.
C’est un crime d’égarer l’opinion, d’utiliser pour une besogne de mort cette opinion qu’on a pervertie jusqu’à la faire délirer.
C’est un crime d’empoisonner les petits et les humbles, d’exaspérer les passions de réaction et d’intolérance, en s’abritant derrière l’odieux antisémitisme, dont la grande France libérale des droits de l’homme mourra, si elle n’en est pas guérie.
C’est un crime que d’exploiter le patriotisme pour des oeuvres de haine, et c’est un crime, enfin, que de faire du sabre le dieu moderne, lorsque toute la science humaine est au travail pour l’oeuvre prochaine de vérité et de justice.
Cette vérité, cette justice, que nous avons si passionnément voulues, quelle détresse à les voir ainsi souffletées, plus méconnues et plus obscurcies! Je me doute de l’écroulement qui doit avoir lieu dans l’âme de M. Scheurer-Kestner, et je crois bien qu’il finira par éprouver un remords, celui de n’avoir pas agi révolutionnairement, le jour de l’interpellation au Sénat, en lâchant tout le paquet, pour tout jeter à bas. Il a été le grand honnête homme, l’homme de sa vie loyale, il a cru que la vérité se suffisait à elle- même, surtout lorsqu’elle lui apparaissait éclatante comme le plein jour. A quoi bon tout bouleverser, puisque bientôt le soleil allait luire?
Et c’est de cette sérénité confiante dont il est si cruellement puni. De même pour le lieutenant-colonel Picquart, qui, par un sentiment de haute dignité, n’a pas voulu publier les lettres du général Gonse. Ces scrupules l’honorent d’autant plus que, pendant qu’il restait respectueux de la discipline, ses supérieurs le faisaient couvrir de boue, instruisaient eux-mêmes son procès, de la façon la plus inattendue et la plus outrageante.
Il y a deux victimes, deux braves gens, deux coeurs simples, qui ont laissé faire Dieu, tandis que le diable agissait. Et l’on a même vu, pour le lieutenant-colonel Picquart, cette chose ignoble : un tribunal français, après avoir laissé le rapporteur charger publiquement un témoin, l’accuser de toutes les fautes, a fait le huis clos, lorsque ce témoin a été introduit pour s’expliquer et se défendre.
Je dis que ceci est un crime de plus et que ce crime soulèvera la conscience universelle. Décidément, les tribunaux militaires se font une singulière idée de la justice.
Telle est donc la simple vérité, monsieur le Président, et elle est effroyable, elle restera pour votre présidence une souillure. Je me doute bien que vous n’avez aucun pouvoir en cette affaire, que vous êtes le prisonnier de la Constitution et de votre entourage. Vous n’en avez pas moins un devoir d’homme, auquel vous songerez, et que vous remplirez. Ce n’est pas, d’ailleurs, que je désespère le moins du monde du triomphe. Je le répète avec une certitude plus véhémente: la vérité est en marche et rien ne l’arrêtera. C’est d’aujourd’hui seulement que l’affaire commence, puisque aujourd’hui seulement les positions sont nettes: d’une part, les coupables qui ne veulent pas que la lumière se fasse; de l’autre, les justiciers qui donneront leur vie pour qu’elle soit faite. Je l’ai dit ailleurs, et je le répète ici: quand on enferme la vérité sous terre, elle s’y amasse, elle y prend une force telle d’explosion, que, le jour où elle éclate, elle fait tout sauter avec elle. on verra bien si l’on ne vient pas de préparer, pour plus tard, le plus retentissant des désastres.

Mais cette lettre est longue, monsieur le Président, et il est temps de conclure. J’accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d’avoir été l’ouvrier diabolique de l’erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d’avoir ensuite défendu son oeuvre néfaste, depuis trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus coupables.

J’accuse le général Mercier de s’être rendu complice, tout au moins par faiblesse d’esprit, d’une des plus grandes iniquités du siècle.
J’accuse le général Billot d’avoir eu entre les mains les preuves certaines de l’innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de s’être rendu coupable de ce crime de lèse- humanité et de lèse-justice, dans un but politique et pour sauver l’état-major compromis.
J’accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s’être rendus complices du même crime, l’un sans doute par passion cléricale, l’autre peut-être par cet esprit de corps qui fait des bureaux de la guerre l’arche sainte, inattaquable.
J’accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d’avoir fait une enquête scélérate, j’entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité, dont nous avons, dans le rapport du second, un impérissable monument de naïve audace.
J’accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard, d’avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu’un examen médical ne les déclare atteints d’une maladie de la vue et du jugement.
J’accuse les bureaux de la guerre d’avoir mené dans la presse, particulièrement dans L’Éclair et dans L’Écho de Paris, une campagne abominable, pour égarer l’opinion et couvrir leur faute.
J’accuse enfin le premier conseil de guerre d’avoir violé le droit, en condamnant un accusé sur une pièce restée secrète, et j’accuse le second conseil de guerre d’avoir couvert cette illégalité, par ordre, en commettant à son tour le crime juridique d’acquitter sciemment un coupable.

En portant ces accusations, je n’ignore pas que je me mets sous le coup des articles 30 et 31 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881, qui punit les délits de diffamation. Et c’est volontairement que je m’expose.

Quant aux gens que j’accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n’ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l’acte que j’accomplis ici n’est qu’un moyen révolutionnaire pour hâter l’explosion de la vérité et de la justice.

Je n’ai qu’une passion, celle de la lumière, au nom de l’humanité qui a tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n’est que le cri de mon âme. Qu’on ose donc me traduire en cour d’assises et que l’enquête ait lieu au grand jour ! J’attends.

Veuillez agréer, monsieur le Président, l’assurance de mon profond respect."



***


Ich Klage an!, Émile Zola

An den Präsidenten der französischen Republik
13. Januar 1898

Herr Präsident!
Gestatten Sie mir, dass ich in meiner Dankbarkeit für die wohlwollende Aufnahme, die ich einst bei Ihnen gefunden, heute Ihren berechtigten Ruhm mir am Herzen liegen lasse, und Ihnen sage, dass Ihr bisher so glückhafter Stern von dem allerschimpflichsten und unauslöschlichsten Flecken bedroht sei?
Sie sind unversehrt aus niedrigsten Verleumdungen hervorgegangen, Sie haben sich die Herzen erobert, Sie erscheinen glänzend in den Strahlen jenes patriotischen Festes, welches die russische Allianz für Frankreich bedeutete, und Sie rüsten sich, unserer Weltausstellung zu präsidieren, die - ein feierlicher Triumph – unser großes Jahrhundert der Arbeit, der Wahrheit und der Freiheit krönen soll. Aber welch ein Schmutzfleck auf Ihrem Namen - fast hätte ich gesagt auf Ihrer Regierung - diese abscheuliche Affäre Dreyfus! Ein Kriegsgericht hat auf Befehl von oben soeben es gewagt, einen Esterhazy freizusprechen und damit aller Wahrheit und aller Gerechtigkeit einen harten Faustschlag ins Gesicht versetzt. Es ist geschehen; Frankreich trägt diese Besudelung auf der Wange; die Geschichte wird berichten, dass Ihre Präsidentschaft es war, unter welcher ein solches Verbrechen an der Gesellschaft begangen werden konnte.
Nun, da Sie es gewagt haben, so will auch ich es wagen! Die Wahrheit, ich werde sie sagen, denn ich habe versprochen, sie zu sagen, wenn nicht eine ordnungsgemäß gehandhabte Rechtsprechung ihr voll und ganz zum Siege verhilft. Meine Pflicht ist es, zu sprechen, ich will nicht Mitschuldiger sein. Meine Nächte würden gestört werden durch das Gespenst des Unschuldigen, der da drüben für ein Verbrechen büßt, das er nicht begangen hat.
Und Ihnen, Herr Präsident, will ich sie entgegenschreien, diese Wahrheit, mit aller Macht der Empörung eines rechtschaffenen Mannes. Zu Ihrer Ehre bin ich überzeugt, dass sie Ihnen unbekannt ist. Und wem anders sollte ich jenen üblen Haufen der wahren Schuldigen anzeigen, wenn nicht Ihnen, dem höchsten Beamten des Landes?
Zunächst die Wahrheit über den Prozess und die Verurteilung von Dreyfus. Ein unheilvoller Mensch hat alles angezettelt, alles gemacht; das ist der Oberstleutnant du Paty de Clam, damals einfacher Major. Er ist die ganze Affäre Dreyfus, und man wird diese erst kennen, wenn eine loyale Untersuchung seine Handlungen und seine Verantwortlichkeit klargelegt haben wird. Er erscheint als ein höchst abenteuerlicher   und   verworrener   Kopf,   der   Romanintrigen   nachjagt   und   sich   in   den   Mitteln   der Sensationsromane gefällt, gestohlenen Papieren, anonymen Briefen, Zusammenkünften an einsamen Orten, geheimnisvollen Frauen, die nachts mit belastenden Papieren herumlaufen.
Er ist es, der darauf verfiel, Dreyfus das Begleitschreiben zuzuschieben, er ist es, der davon träumte, ihn in einem mit Spiegeln ausgelegten Zimmer zu beobachten, er ist es, den uns der Major Forzinetti vorführt, wie er mit einer Blendlaterne versehen sich zu dem schlafenden Angeklagten führen lassen will, um auf dessen Gesicht einen plötzlichen Lichtstrahl zu werfen und so das Verbrechen gleichsam beim ersten Schreck des Erwachens zu fassen. Und ich brauche nicht alles zu sagen; sucht, und ihr werdet finden. Ich erkläre nur, dass der Major du Paty de Clam, der beauftragt war, die Affäre Dreyfus als Beamter der Justiz zu untersuchen, nach der Reihenfolge der Daten und der Verantwortlichkeiten der erste Schuldige an dem Justizirrtum ist...
Ach! wie ein Alpdruck lastet es auf dem, der diesen Anfang der Sache in allen seinen Einzelheiten kennt! Der Major du Paty de Clam setzt Dreyfus gefangen und bringt ihn in die Geheimhaft. Er läuft zu Frau Dreyfus, er versetzt sie in Schrecken, er sagt ihr, dass, wenn sie rede, ihr Gatte verloren sei. Unterdessen zerriss sich der Unglückliche seinen Leib, um seine Unschuld hinauszurufen.
Und die Untersuchung wurde in einer Weise geführt, die uns an die Chroniken des fünfzehnten Jahrhunderts erinnert: im tiefsten Geheimnis, mit einer Menge barbarischer Mittel; dabei beruht sie auf einem einzigen, kindischen Beweisstück: auf jenem albernen Begleitschreiben, das nicht bloß auf einen gewöhnlichen Verrat, sondern auch auf die denkbar frechste Gaunerei hinauslief, denn die berühmten preisgegebenen Geheimnisse waren nämlich fast alle ohne Wert.
Ich verweile hierbei, denn hier liegt der Keim, aus dem sich später das wahre Verbrechen herausentwickelt, die furchtbare Rechtsverweigerung, an der Frankreich krank ist. Ich möchte handgreiflich nachweisen, wie der Justizirrtum möglich sein konnte, wie er aus den Machinationen des Majors du Paty de Clam entstanden ist, wie der General Mercier, die Generäle de Boisdeffre und Gonse sich mit hineinziehen ließen, wie sie allmählich die Verantwortung für diesen Irrtum übernahmen, und wie sie es nachmals für ihre Pflicht hielten, ihn als die heilige Wahrheit zu proklamieren, als eine Wahrheit, die nicht mehr in Frage gestellt werden kann.
Zu Beginn war also von ihrer Seite nur Fahrlässigkeit und Mangel an Einsicht im Spiele. Höchstens spürt man noch, wie sie den konfessionellen Leidenschaften ihres Milieus und den Vorurteilen des Korpsgeistes nachgeben. Sie haben der Torheit ihren Lauf gelassen.
Dreyfus erscheint vor dem Kriegsgericht. Die Verhandlung wird bei geschlossenen Türen so geheim wie nur möglich geführt... Die Nation ist wie betäubt, man flüstert von fürchterlichen Dingen, von ungeheuerlichen Verrätereien, wie sie die Geschichte beschmutzen, und die Nation beugt sich natürlich dem Urteil. Da ist ihr keine Züchtigung strenge genug, sie begrüßt die öffentliche Degradation mit ihrem Beifall, sie möchte, dass der Schuldige sich auf seinem Schandfelsen in Gewissensqualen verzehre.
Aber sind sie denn wahr, diese unsagbaren Dinge, diese gefährlichen Dinge, die Europa in Flammen zu setzen vermöchten und die man so sorgfältig hinter geschlossenen Türen begraben mußte? Nein, es stecken nur die romanhaften und wahnwitzigen Phantasien des Majors du Paty de Clam dahinter; alles das geschah nur, um den abgeschmacktesten Feuilletonroman den Blicken zu entziehen. Um sich diese Gewissheit zu verschaffen, braucht man nur die Anklageakte, die vor dem Kriegsgericht verlesen worden ist, zu prüfen.
Oh, über die Inhaltslosigkeit dieser Anklageschrift! Dass ein Mensch auf dieses Aktenstück hin verurteilt werden konnte, ist eine ungeheuerliche Ungerechtigkeit! Ich frage, ob ein rechtschaffener Mensch es lesen kann, ohne dass sich sein Herz vor Entrüstung aufbäumt und vor Empörung aufschreit, wenn er dabei der unwürdigen Buße drüben auf der Teufelsinsel gedenkt. Dreyfus spricht mehrere Sprachen: schuldig, man findet bei ihn kein belastendes Beweisstück: schuldig; er ist fleißig und sucht sich über alles zu unterrichten: schuldig; er gerät nicht in Verwirrung: schuldig; er gerät in Verwirrung: schuldig. Was für Naivitäten in der Formulierung, was für bestimmte Behauptungen ins Blaue hinein! Man hat uns von vierzehn Anklagepunkten geredet, und wir finden jetzt nur einen einzigen: am Ende der Aufstellung: das Begleitschreiben. Wir erfahren obendrein, dass die Sachverständigen sich durchaus nicht einig waren, dass einer von ihnen, Herr Gobert, dienstlichen Verweis erhielt, weil er sich erlaubte, nicht in dem gewünschten Sinne auszusagen. Man sprach auch von dreiundzwanzig Offizieren, die gekommen seien, Dreyfus durch ihre Zeugnisaussagen zu erdrücken.
Noch wissen wir nichts über ihr Verhör, aber sicher ist, dass nicht alle ihn belastet haben, und es ist außerdem zu beachten, dass alle dem Kriegsministerium angehörten. Es ist ein Familienprozess, man ist da unter sich, und daran muß man sich erinnern: der Generalstab hat den Prozess gewollt; er hat das erste Mal zu Gericht gesessen, und er hat auch eben jetzt wieder zweiten Mal zu Gericht gesessen.
Es blieb also nur das Begleitschreiben, über das die Sachverständigen sich nicht geeinigt haben. Man erzählt, dass im Beratungszimmer die Richter, wie natürlich, dicht am Freispruch waren. Und begreift nun die verzweifelte Hartnäckigkeit, mit der man, um die Verurteilung zu rechtfertigen, behauptet, dass ein geheimes Beweisstück existiert, ein vernichtendes Beweisstück, das man nicht vorzeigen darf und das alles rechtfertigt, und dem wir weichen müssen, ein unsichtbarer und unerkennbarer Gott!
Die Existenz eines solchen Beweisstückes bestreite ich, ich bestreite sie mit aller Macht. Ein lächerliches Beweisstück, jawohl! Vielleicht das Beweisstück, worin von gefälligen Frauen die Rede ist und in dem von einem gewissen D. gesprochen wird, der zu anspruchsvoll wird; ohne Zweifel ein Gatte, der fand, dass man ihm seine Frau nicht teuer genug bezahlte. Aber ein Beweisstück, das etwas mit der Verteidigung des Staates zu tun hat, das man nicht vorlegen darf, ohne dass morgen der Krieg erklärt würde, nein, nein! Das ist eine Lüge, und sie ist um so abscheulicher und zynischer, als diese Leute ungestraft lügen können und man sie nicht überführen kann.
Sie wiegeln Frankreich auf, sie verstecken sich hinter seiner berechtigten Erregung, sie machen die Zungen stumm, da sie die Herzen verwirren und die Köpfe verderben. Ich kenne kein größeres Verbrechen gegen die bürgerliche Gesellschaft...
Und nun kommen wir zu der Affäre Esterhazy. Drei Jahre sind vergangen, viele Gewissen sind schwer beklommen, sie beunruhigen sich sie suchen und gewinnen schließlich die Überzeugung von der Unschuld des Dreyfus.
Ich werde nicht die Geschichte der Zweifel und der endlichen Überzeugung des Herrn Scheurer-Kestner schreiben. Aber während er seinerseits nachforschte, ereigneten sich ernste Dinge im Generalstab selbst. Der Oberst Sandherr war gestorben und der Oberstleutnant Picquart war ihm als Chef des Informationsbureaus gefolgt. Und in dieser Eigenschaft und in der Ausübung seines Amtes kam eines Tages ein Brieftelegramm in seine Hände, das von einem Agenten einer auswärtigen Macht an Esterhazy gerichtet war. Seine strikte Pflicht wäre es gewesen, eine Unterredung zu eröffnen.
Er handelte, das ist sicher, niemals anders als im Einverständnis mit seinen Vorgesetzten. Er unterbreitete also seinen Verdacht seinen Vorgesetzten der Reihe nach: dem General Gonse, dann dem General de Boisdeffre, endlich dem General Billot, der als Kriegsminister General Merciers Nachfolger war.
Die berühmte Akte Picquart, von der soviel die Rede war, war nie etwas anderes als die Akte Billot, d.h. eine Akte, die ein Untergebener für seinen Minister zusammengestellt hat und die heute noch im Kriegsministerium existieren muss. Die Nachforschungen dauerten von Mai bis September 1896, und man muß es deutlich feststellen, dass der General Gonse von der Schuld Esterhazys überzeugt war und dass die Generäle de Boisdeffre und Billot keinen Zweifel hegten, dass das famose Begleitschreiben von der Hand Esterhazys war. Die Untersuchung des Oberstleutnants Picquart hatte dies mit Sicherheit festgestellt.
Aber die Aufregung war groß, denn die Verurteilung Esterhazys hätte die Revision des Dreyfus – Prozesses unvermeidlich nach sich gezogen, und gerade dies wollte der Generalstab um jeden Preis vermeiden...
Der Oberst Picquart hatte seine Pflicht als rechtschaffner Mann getan. Im Namen der Gerechtigkeit drang er unablässig in seine Vorgesetzten. Er beschwor sie, er sagte ihnen, wie unpolitisch ihr Zögern sei angesichts des furchtbaren Unwetters, das sich zusammenzog und das ausbrechen musste, sobald die Wahrheit bekannt wurde.
Dieselbe Sprache führte später Herr Scheurer-Kestner gegenüber dem General Billot, als er ihn beschwor, aus Vaterlandsliebe die Angelegenheit in die Hand zu nehmen, ehe sie sich verschlimmere und ein öffentliches Unheil würde. Nein! Das Verbrechen war begangen, und der Generalstab konnte sein Verbrechen nicht mehr eingestehen.
Der Oberstleutnant Picquart wurde in einer Mission weggeschickt, man entfernte ihn weiter und weiter bis nach Tunis; dort wollte man sogar eines Tages seine Bravour besonders ehren und ihn mit einer Mission betrauen, bei der er sicherlich zugrunde gegangen wäre: und zwar in derselben Gegend, in welcher der Marquis de Mords einst seinen Tod gefunden hatte. Er war nicht in Ungnade gefallen, der General Gonse unterhielt einen freundschaftlichen Briefwechsel mit ihm. Aber es ist nun einmal nicht gut, hinter gewisse Geheimnisse gekommen zu sein! In Paris ging die Wahrheit ihren Weg unaufhaltsam, und es ist bekannt, wie das erwartete Unwetter losbrach.
Herr Mathieu Dreyfus zeigte den Major Esterhazy als den wahren Urheber des Begleitschreibens an, gerade als Herr Scheurer-Kestner dem Siegelbewahrer sein Gesuch um Revision des Prozesses einzureichen im Begriffe stand. Und jetzt erscheint der Major Esterhazy auf der Szene.
Die vorliegenden Zeugnisse zeigen ihn uns zunächst ganz außer Fassung, zum Selbstmord oder zur Flucht bereit. Dann plötzlich kehrt er Tapferkeit heraus und verblüfft Paris durch die Kühnheit seines Verhaltens. Und warum? Man war ihm zu Hilfe gekommen, er hatte einen anonymen Brief erhalten, der ihn von den Umtrieben seiner Feinde in Kenntnis setzte. Eine geheimnisvolle Dame hatte sogar ihre Ruhe geopfert, um ihm nächtlicherweile ein dem Generalstab entwendetes Schriftstück einzuhändigen, das ihm Rettung bringen sollte.
Und ich kann nicht umhin, hier den Oberstleutnant du Paty de Clam mit den Auskunftsmitteln seiner fruchtlosen Phantasie wiederzufinden. Sein Werk, die Schuld des Dreyfus, war in Gefahr, und er wollte zweifellos seinem Werke zu Hilfe kommen. Die Revision des Prozesses! Das wäre ja der Zusammenbruch seines grausigen und furchtbaren Schauerromans gewesen, der sich schändlicherweise auf der Teufelsinsel abspielt. Das konnte er doch nicht zulassen! Von jetzt ab beginnt der Kampf zwischen Oberstleutnant Picquart und dem Oberstleutnant du Paty de Clam, der eine mit offenem, der andere mit geschlossenem Visier fechtend. Man wird den beiden demnächst vor dem Zivilgerichte wieder begegnen. Aber im Grunde ist es doch immer der Generalstab, der sich verteidigt und ein Verbrechen nicht eingestehen will, dessen Schändlichkeit von Stunde zu Stunde wächst.
Man hat sich verblüfft gefragt, wer denn eigentlich die Beschützer des Majors Esterhazy seien. Da ist zunächst, im Hintergrunde, der Oberstleutnant du Paty de Clam, der alles angestiftet und durchgeführt hat. An der Abgeschmacktheit der Mittel erkennt man seine Hand. Da ist ferner der General de Boisdeffre, da ist der General Gonse, da ist der General Billot selbst, die sich alle genötigt sehen, den Major freisprechen zu lassen: denn wollten sie Dreyfus' Unschuld an den Tag kommen lassen, so würden die Bureaus des Kriegsministeriums unter der öffentlichen Verachtung zusammenbrechen.
Und - schönes Ergebnis dieser ungeheuerlichen Situation - der einzige Ehrliche in der Sache, der allein seine Schuldigkeit getan hat, der Oberst Picquart, wird das Opfer sein, ihn wird man verunglimpfen und strafen. O Gerechtigkeit, welch fürchterliche Entmutigung schnürt uns das Herz zusammen! Man geht so weit, zu sagen, dass Picquart selbst der Fälscher sei, dass er das Brieftelegramm fabriziert habe, um Esterhazy, zu verderben.
Aber, großer Gott, warum denn? In welcher Absicht? Gebt einen Grund an! Ist auch Picquart vielleicht von den Juden bezahlt? Und das Schönste bei der Sache ist, dass gerade er Antisemit war. Ja, wir erleben das infame Schauspiel: Man proklamiert die Unschuld von durch Schulden und Verbrechen ruinierten Burschen, und man trifft die Ehrenhaftigkeit selbst, einen Mann von fleckenlosem Wandel! Wahrlich, wenn die menschliche Gesellschaft dahin gekommen ist, so ist sie der Auflösung verfallen.
Das also, Herr Präsident, ist die Affäre Esterhazy: ein Schuldiger, der freigesprochen werden soll. Seit bald zwei Monaten schon können wir Stunde um Stunde den Gang der schönen Arbeit verfolgen. Ich fasse mich kurz, denn dies hier soll ja nur in großen Zügen ein Umriss jener Geschichte sein, die man einstmals mit aller Ausführlichkeit in glühenden Lettern geschrieben finden wird. Und so sahen wir den General de Pellieux, dann den Major Ravary eine verbrecherische Untersuchung führen, aus der die Schurken reingewaschen und die ehrlichen Leute beschmutzt hervorgehen. Dann hat man das Kriegsgericht zusammengerufen.

Wie hat man hoffen können, dass ein Kriegsgericht zunichte machen würde, was ein Kriegsgericht gemacht hatte? Ich will nicht einmal von der immer möglichen Auswahl der Richter sprechen. Genügt die übermächtige Idee der Disziplin, die diesen Soldaten im Blute steckt, nicht, die Fähigkeit zur Gerechtigkeit abzutöten? Disziplin und Gehorsam bedeuten ein und dasselbe. Wie kann man, wenn der Kriegsminister, der oberste Chef, unter dem Beifall der Volksvertretung öffentlich die Unanfechtbarkeit des gefällten Urteils proklamiert, wie kann man da von einem Kriegsgericht verlangen, dass es ihn in aller Form Lügen straft? In der Hierarchie ist Derartiges unmöglich. Der General Billot hat auf die Richter durch seine Erklärung eine Suggestion ausgeübt, und sie haben geurteilt, gerade so wie sie ins Feuer gehen müssen, ohne zu überlegen. Sie brachten auf ihren Richtersitz augenscheinlich die vorgefasste Meinung mit:
Dreyfus ist von einem Kriegsgericht wegen Verbrechen des Verrats verurteilt worden; also ist er schuldig, und wir, als Kriegsgericht, wir können ihn nicht unschuldig erklären. Die Anerkennung einer Schuld des Esterhazy würde aber die Anerkennung der Unschuld Dreyfus' sein.
Sie haben einen unerhörten Spruch gefällt, der für immer auf unseren Kriegsgerichten lasten, der in aller Zukunft ihre Urteile mit Verdacht beflecken wird.
Das erste Kriegsgericht ist vielleicht töricht gewesen, das zweite ist unbedingt verbrecherisch. Seine Entschuldigung, ich wiederhole es, liegt darin, dass der oberste Chef gesprochen und das gefällte Urteil für unangreifbar, für heilig und für unantastbar erklärt hatte, so dass Untergebene nicht das Gegenteil sagen konnten. Man spricht uns von der Ehre der Armee, wir sollen sie lieben, sie achten. O gewiss, ja, die Armee, die sich bei der ersten Drohung erheben, die den französischen Boden verteidigen würde, sie ist das ganze Volk, und wir fühlen für sie nur Liebe und Achtung. Aber um sie handelt es sich hier nicht, um sie, deren Würde wir gerade in unserem Verlangen nach Gerechtigkeit wahren wollen...
Ich habe bereits an anderer Stelle gezeigt: die Dreyfus-Angelegenheit war die Angelegenheit des Kriegsministeriums, ein Generalstabsoffizier, von seinen Kameraden denunziert, verurteilt unter dem Drucke des Generalstabschefs. Und ich wiederhole, er kann nicht unschuldig erklärt werden, ohne dass der ganze Generalstab schuldig wird. Deshalb also haben die Bureaus mit allen erdenklichen Mitteln, durch einen Pressefeldzug, durch Informationen, Beeinflussungen, Esterhazy gedeckt; sie taten es nur, um Dreyfus ein zweites Mal zu verderben...
Und ein Verbrechen ist endlich, dass man sich auf die Schmutzpresse gestützt hat, dass man sich von der Schurken von Paris hat verteidigen lassen, so dass jetzt dieses Gesindel über die Niederlage des Rechts und der schlichten Ehrlichkeit unverschämt triumphiert.
Es ist ein Verbrechen, diejenigen, die Frankreich edel und an der Spitze der freien und gerechten Völker sehen möchten, der Unruhestiftung anzuklagen, wenn man selbst das schamlose Komplott schmiedet, dem Irrtum mit Gewalt vor der Welt zum Siege zu verhelfen.
Es ist ein Verbrechen, die öffentliche Meinung in die Irre zu führen und diese Meinung, die man bis zum Wahnsinn verderbt hat, für eine Mordtat auszunutzen.
Es ist ein Verbrechen, das einfache und niedere Volk zu vergiften, die Leidenschaften der Reaktion und der Intoleranz zum Äußersten zu bringen, indem man sich hinter den schändlichen Antisemitismus verschanzt, an dem das große liberale Frankreich der Menschenrechte stirbt, wenn es nicht von ihm geheilt wird.
Es ist ein Verbrechen, die Vaterlandsliebe für Werke des Hasses auszubeuten, es ist endlich ein Verbrechen, den Säbel zum modernen Gott zu machen, während doch die menschliche Wissenschaft an dem Werk der Wahrheit und Gerechtigkeit arbeitet.
Welch ein Jammer, sie so ins Angesicht geschlagen, so verkannt und so verdunkelt zu sehen, jene Wahrheit,jene Gerechtigkeit, nach der wir uns so leidenschaftlich gesehnt haben! Ich ahne den Zusammenbrach im Innern des Herrn Scheurer-Kestner, und ich glaube, er wird sich schließlich den Vorwurf machen, dass er am Tage seiner Interpellation im Senat nicht radikal genug vorgegangen ist, um alle Akten zu enthüllen und um alles niederzuschmettern. Er ist stets der große, ehrenwerte Mann gewesen, da er seiner lebenslangen Loyalität treu blieb: er hat geglaubt, dass die Wahrheit sich von selbst durchsetzt, zumal sie ihm so strahlend erschien wie der helle Tag ...
Ein Ähnliches gilt für den Oberstleutnant Picquart, der in nobler Gesinnung die Briefe des Generals   Gonse nicht zu veröffentlichen vermochte. Diese Skrupel ehren ihn um somehr, als seine Vorgesetzten ihn, während er Disziplin hielt, mit Kot bewerfen ließen und einen Prozess in der unerwartetsten und beschimpfendsten Weise gegen ihn in Gang brachten. Es gibt also zwei Opfer, zwei ehrliche Leute, zwei einfache Herzen, welche ihre Sache Gott anheimgaben, während der Teufel am Werke war...
Das also, Herr Präsident, ist die einfache Wahrheit, und sie ist entsetzlich, sie wird als Schandfleck auf IhrerPräsidentschaft haften. Ich glaube wohl, dass Sie in dieser Sache keinerlei Macht besitzen, dass Sie der Gefangene der Verfassung und Ihrer Umgebung sind. Dessen ungeachtet haben Sie eine Pflicht als Mensch, an die Sie denken und die Sie erfüllen werden. Nicht dass ich im geringsten am siegreichen Ausgang zweifelte!
Ich wiederhole es mit immer verstärkter Gewissheit: Die Wahrheit ist auf dem Wege, und nichts wird sie aufhalten... Ich sagte es schon anderswo und ich wiederhole es hier: Wenn man die Wahrheit begräbt, ballt sie sich zusammen und gewinnt eine solche Sprenggewalt, dass sie an dem Tage, an welchem sie sich durchsetzt, alles mit sich in die Luft reißt. Man hüte sich, früher oder später diese fürchterlichste Katastrophe heraufzubeschwören.
Es wird Zeit, zum Schluss zu kommen.
Ich klage den Oberstleutnant du Paty de Clam an, der teuflische Verfertiger des Justizverbrechens - wenn auch unbewusst, wie ich glauben will - gewesen zu sein und dann sein unheilvolles Werk seit drei Jahren mit den abgeschmacktesten und verwerflichsten Machenschaften verteidigt zu haben.
Ich klage den General Mercier an, sich mindestens aus Schwäche an einer der größten Ungerechtigkeiten des Jahrhunderts mitschuldig gemacht zu haben.
Ich klage den General Billot an, die sicheren Beweise für Dreyfus' Unschuld in Händen gehabt und sie unterdrückt und sich dieses Verbrechens einer Verletzung der Menschlichkeit und der Gerechtigkeit schuldig gemacht zu haben, in der politischen Absicht, den kompromittierten Generalstab zu retten.
Ich klage den General de Boisdeffre und den General Gonse an, sich an demselben Verbrechen mitschuldig gemacht zu haben, der eine zweifellos aus leidenschaftlichen klerikalen Neigungen, der andere vielleicht aus jenem Korpsgeist heraus, der die Bureaus des Kriegsministeriums zum unnahbaren Allerheiligsten macht.
Ich klage den General de Pellieux und den Major Ravary an, eine verbrecherische Untersuchung geführt zu haben; ich verstehe darunter eine Untersuchung von jener ungeheuerlichen Parteilichkeit, wie sie sich uns in dem Bericht Ravarys kundgibt, einem unvergänglichen Denkmal von naiver Verwegenheit.
Ich klage die drei Schreibsachverständigen, die Herren Belhomme, Varinard und Couard an, verlogene und betrügerische Berichte erstattet zu haben, es sei denn, dass eine ärztliche Untersuchung sie als von einer Erkrankung des Seh- und des Urteilsvermögens befallen erklärt.
Ich klage das Kriegsministerium an, in der Presse, insbesondere im „Eclair“ und im „Echo de Paris“, einen abscheulichen Feldzug geführt zu haben, um die öffentliche Meinung irrezuleiten und seinen Fehler zu verdecken.
Ich klage endlich das erste Kriegsgericht an, das Recht vergewaltigt zu haben, indem es einen Angeklagten auf ein geheimgebliebenes Schriftstück hin verurteilte, und ich klage das zweite Kriegsgericht   an, diese Rechtsverletzung gedeckt zu haben, indem es seinerseits das Rechtsverbrechen beging, wissentlich einen Schuldigen freizusprechen.

Indem ich diese Anklagen erhebe, weiß ich sehr wohl, dass ich mich vor den Artikeln 30 und 31 des Pressgesetzes vom 29. Juli 1881, die das Vergehen der üblen Nachrede mit Strafe bedrohen, verantwortlich mache. Absichtlich setze ich mich dem aus.
Die Leute, die ich anklage, kenne ich nicht, ich habe sie nie gesehen, ich hege weder Groll noch Hass gegen sie.
Sie sind für mich nur Erscheinungen, Symptome der Krankheit der Gesellschaft. Und die Handlung, die ich hier vollziehe, ist nur ein radikales Mittel, um den Ausbruch der Wahrheit und der Gerechtigkeit zu beschleunigen.
Ich habe nur eine Leidenschaft, die des Lichtes, im Namen der Menschheit, die so viel gelitten hat und die ein Recht auf Glück besitzt. Mein flammender Protest ist nur der Schrei meiner Seele. Man wage es also, mich vor ein Schwurgericht zu stellen und die Untersuchung beim hellen Tageslichte vor sich gehen zu lassen!
Ich warte darauf.

Emile Zola

***



I accuse! Emile Zola


Emile Zola 1898

Letter to the President of the Republic
Source: Chameleon Translations;
First Published: L’Aurore, 13 January 1898.

Sir,

Would you allow me, grateful as I am for the kind reception you once extended to me, to show my concern about maintaining your well-deserved prestige and to point out that your star which, until now, has shone so brightly, risks being dimmed by the most shameful and indelible of stains?

Unscathed by vile slander, you have won the hearts of all. You are radiant in the patriotic glory of our country’s alliance with Russia, you are about to preside over the solemn triumph of our World Fair, the jewel that crowns this great century of labour, truth, and freedom. But what filth this wretched Dreyfus affair has cast on your name - I wanted to say ‘reign’ -. A court martial, under orders, has just dared to acquit a certain Esterhazy, a supreme insult to all truth and justice. And now the image of France is sullied by this filth, and history shall record that it was under your presidency that this crime against society was committed.

As they have dared, so shall I dare. Dare to tell the truth, as I have pledged to tell it, in full, since the normal channels of justice have failed to do so. My duty is to speak out; I do not wish to be an accomplice in this travesty. My nights would otherwise be haunted by the spectre of the innocent man, far away, suffering the most horrible of tortures for a crime he did not commit.

And it is to you, Sir, that I shall proclaim this truth, with all the force born of the revulsion of an honest man. Knowing your integrity, I am convinced that you do not know the truth. But to whom if not to you, the first magistrate of the country, shall I reveal the vile baseness of the real guilty parties?

The truth, first of all, about Dreyfus’ trial and conviction:
At the root of it all is one evil man, Lt. Colonel du Paty de Clam, who was at the time a mere Major. He is the entire Dreyfus case, and the entirety of it will only come to light when an honest enquiry firmly establishes his actions and responsibilities. He appears to be the shadiest and most complex of creatures, spinning outlandish intrigues, stooping to the deceits of cheap thriller novels, complete with stolen documents, anonymous letters, meetings in deserted spots, mysterious women scurrying around at night, peddling damning evidence. He was the one who came up with the scheme of dictating the text of the bordereau to Dreyfus; he was the one who had the idea of observing him in a mirror-lined room. And he was the one that Major Forzinetti caught carrying a shuttered lantern that he planned to throw open on the accused man while he slept, hoping that, jolted awake by the sudden flash of light, Dreyfus would blurt out his guilt.
I need say no more: let us seek and we shall find. I am stating simply that Major du Paty de Clam, as the officer of justice charged with the preliminary investigation of the Dreyfus case, is the first and the most grievous offender in the ghastly miscarriage of justice that has been committed.
The bordereau had already been for some time in the hands of Colonel Sandherr, Head of the Intelligence Office, who has since died of a paralytic stroke. Information was ‘leaked’, papers were disappearing, then as they continue to do to this day; and, as the search for the author of the bordereau progressed, little by little, an a priori assumption developed that it could only have come from an officer of the General Staff, and furthermore, an artillery officer. This interpretation, wrong on both counts, shows how superficially the bordereau was analysed, for a logical examination shows that it could only have come from an infantry officer.
So an internal search was conducted. Handwriting samples were compared, as if this were some family affair, a traitor to be sniffed out and expelled from within the War Office. And, although I have no desire to dwell on a story that is only partly known, Major du Paty de Clam entered on the scene as soon as the slightest suspicion fell upon Dreyfus. From that moment on, he was the one who ‘invented’ Dreyfus the traitor, the one who orchestrated the whole affair and made it his own. He boasted that he would confuse him and make him confess all. Oh, yes, there was of course the Minister of War, General Mercier, a man of apparently mediocre intellect; and there were also the Chief of Staff, General de Boisdeffre, who appears to have yielded to his own religious bigotry, and the Deputy Chief of Staff, General Gonse, whose conscience allowed for many accommodations. But, at the end of the day, it all started with Major du Paty de Clam, who led them on, hypnotised them, for, as an adept of spiritualism and the occult, he conversed with spirits. Nobody would ever believe the experiments to which he subjected the unfortunate Dreyfus, the traps he set for him, the wild investigations, the monstrous fantasies, the whole demented torture.

Ah, that first trial! What a nightmare it is for all who know it in its true details. Major du Paty de Clam had Dreyfus arrested and placed in solitary confinement. He ran to Mme Dreyfus, terrorised her, telling her that, if she talked, that was it for her husband. Meanwhile, the unfortunate Dreyfus was tearing his hair out and proclaiming his innocence. And this is how the case proceeded, like some fifteenth century chronicle, shrouded in mystery, swamped in all manner of nasty twists and turns, all stemming from one trumped-up charge, that stupid bordereau. This was not only a bit of cheap trickery but also the most outrageous fraud imaginable, for almost all of these notorious secrets turned out in fact to be worthless. I dwell on this, because this is the germ of it all, whence the true crime would emerge, that horrifying miscarriage of justice that has blighted France. I would like to point out how this travesty was made possible, how it sprang out of the machinations of Major du Paty de Clam, how Generals Mercier, de Boisdeffre and Gonse became so ensnared in this falsehood that they would later feel compelled to impose it as holy and indisputable truth. Having set it all in motion merely by carelessness and lack of intelligence, they seem at worst to have given in to the religious bias of their milieu and the prejudices of their class. In the end, they allowed stupidity to prevail.
But now we see Dreyfus appearing before the court martial. Behind the closed doors, the utmost secrecy is demanded. Had a traitor opened the border to the enemy and driven the Kaiser straight to Notre-Dame the measures of secrecy and silence could not have been more stringent. The public was astounded; rumors flew of the most horrible acts, the most monstrous deceptions, lies that were an affront to our history. The public, naturally, was taken in. No punishment could be too harsh. The people clamored for the traitor to be publicly stripped of his rank and demanded to see him writhing with remorse on his rock of infamy. Could these things be true, these unspeakable acts, these deeds so dangerous that they must be carefully hidden behind closed doors to keep Europe from going up in flames? No! They were nothing but the demented fabrications of Major du Paty de Clam, a cover-up of the most preposterous fantasies imaginable. To be convinced of this one need only read carefully the accusation as it was presented before the court martial.
How flimsy it is! The fact that someone could have been convicted on this charge is the ultimate iniquity. I defy decent men to read it without a stir of indignation in their hearts and a cry of revulsion, at the thought of the undeserved punishment being meted out there on Devil’s Island. He knew several languages: a crime! He carried no compromising papers: a crime! He would occasionally visit his country of origin: a crime! He was hard-working, and strove to be well informed: a crime! He did not become confused: a crime! He became confused: a crime! And how childish the language is, how groundless the accusation! We also heard talk of fourteen charges but we found only one, the one about the bordereau, and we learn that even there the handwriting experts could not agree. One of them, Mr. Gobert, faced military pressure when he dared to come to a conclusion other than the desired one. We were told also that twenty-three officers had testified against Dreyfus. We still do not know what questions they were asked, but it is certain that not all of them implicated him. It should be noted, furthermore, that all of them came from the War Office. The whole case had been handled as an internal affair, among insiders. And we must not forget this: members of the General Staff had sought this trial to begin with and had passed judgment. And now they were passing judgment once again.
So all that remained of the case was the bordereau, on which the experts had not been able to agree. It is said that within the council chamber the judges were naturally leaning toward acquittal. It becomes clear why, at that point, as justification for the verdict, it became vitally important to turn up some damning evidence, a secret document that, like God, could not be shown, but which explained everything, and was invisible, unknowable, and incontrovertible. I deny the existence of that document. With all my strength, I deny it! Some trivial note, maybe, about some easy women, wherein a certain D... was becoming too insistent, no doubt some demanding husband who felt he wasn’t getting a good enough price for the use of his wife. But a document concerning national defense that could not be produced without sparking an immediate declaration of war tomorrow? No! No! It is a lie, all the more odious and cynical in that its perpetrators are getting off free without even admitting it. They stirred up all of France, they hid behind the understandable commotion they had set off, they sealed their lips while troubling our hearts and perverting our spirit. I know of no greater crime against the state.
These, Sir, are the facts that explain how this miscarriage of justice came about; The evidence of Dreyfus’s character, his affluence, the lack of motive and his continued affirmation of innocence combine to show that he is the victim of the lurid imagination of Major du Paty de Clam, the religious circles surrounding him, and the “dirty Jew” obsession that is the scourge of our time.

And now we come to the Esterhazy case. Three years have passed, many consciences remain profoundly troubled, become anxious, investigate, and wind up convinced that Dreyfus is innocent.
I shall not chronicle these doubts and the subsequent conclusion reached by Mr. Scheurer-Kestner . But, while he was conducting his own investigation, major events were occurring at headquarters. Colonel Sandherr had died and Lt. Colonel Picquart had succeeded him as Head of the Intelligence Office. It was in this capacity, in the exercise of his office, that Lt. Colonel Picquart came into possession of a telegram addressed to Major Esterhazy by an agent of a foreign power. His express duty was to open an inquiry. What is certain is that he never once acted against the will of his superiors. He thus submitted his suspicions to his hierarchical senior officers, first General Gonse, then General de Boisdeffre, and finally General Billot, who had succeeded General Mercier as Minister of War. That famous much discussed Picquart file was none other than the Billot file, by which I mean the file created by a subordinate for his minister, which can still probably be found at the War Office. The investigation lasted from May to September 1896, and what must be said loud and clear is that General Gonse was at that time convinced that Esterhazy was guilty and that Generals de Boisdeffre and Billot had no doubt that the handwriting on the famous bordereau was Esterhazy’s. This was the definitive conclusion of Lt. Colonel Picquart’s investigation. But feelings were running high, for the conviction of Esterhazy would inevitably lead to a retrial of Dreyfus, an eventuality that the General Staff wanted at all cost to avoid.
This must have led to a brief moment of psychological anguish. Note that, so far, General Billot was in no way compromised. Newly appointed to his position, he had the authority to bring out the truth. He did not dare, no doubt in terror of public opinion, certainly for fear of implicating the whole General Staff, General de Boisdeffre, and General Gonse, not to mention the subordinates. So he hesitated for a brief moment of struggle between his conscience and what he believed to be the interest of the military. Once that moment passed, it was already too late. He had committed himself and he was compromised. From that point on, his responsibility only grew, he took on the crimes of others, he became as guilty as they, if not more so, for he was in a position to bring about justice and did nothing. Can you understand this: for the last year General Billot, Generals Gonse and de Boisdeffre have known that Dreyfus is innocent, and they have kept this terrible knowledge to themselves? And these people sleep at night, and have wives and children they love!
Lt. Colonel Picquart had carried out his duty as an honest man. He kept insisting to his superiors in the name of justice. He even begged them, telling them how impolitic it was to temporize in the face of the terrible storm that was brewing and that would break when the truth became known. This was the language that Mr. Scheurer-Kestner later used with General Billot as well, appealing to his patriotism to take charge of the case so that it would not degenerate into a public disaster. But no! The crime had been committed and the General Staff could no longer admit to it. And so Lt. Colonel Picquart was sent away on official duty. He got sent further and further away until he landed in Tunisia, where they tried eventually to reward his courage with an assignment that would certainly have gotten him massacred, in the very same area where the Marquis de Morès had been killed. He was not in disgrace, indeed: General Gonse even maintained a friendly correspondence with him. It is just that there are certain secrets that are better left alone.
Meanwhile, in Paris, truth was marching on, inevitably, and we know how the long-awaited storm broke. Mr Mathieu Dreyfus denounced Major Esterhazy as the real author of the bordereau just as Mr Scheurer-Kestne was handing over to the Minister of Justice a request for the revision of the trial. This is where Major Esterhazy comes in. Witnesses say that he was at first in a panic, on the verge of suicide or running away. Then all of a sudden, emboldened, he amazed Paris by the violence of his attitude. Rescue had come, in the form of an anonymous letter warning of enemy actions, and a mysterious woman had even gone to the trouble one night of slipping him a paper, stolen from headquarters, that would save him. Here I cannot help seeing the handiwork of Lt Colonel du Paty de Clam, with the trademark fruits of his fertile imagination. His achievement, Dreyfus’s conviction, was in danger, and he surely was determined to protect it. A retrial would mean that this whole extraordinary saga, so extravagant, so tragic, with its denouement on Devil’s Island, would fall apart! This he could not allow to happen. From then on, it became a duel between Lt Colonel Picquart and Lt Colonel du Paty de Clam, one with his face visible, the other masked. The next step would take them both to civil court. It came down, once again, to the General Staff protecting itself, not wanting to admit its crime, an abomination that has been growing by the minute.
In disbelief, people wondered who Commander Esterhazy’s protectors were. First of all, behind the scenes, Lt Colonel du Paty de Clam was the one who had concocted the whole story, who kept it going, tipping his hand with his outrageous methods. Next General de Boisdeffre, then General Gonse, and finally, General Billot himself were all pulled into the effort to get the Major acquitted, for acknowledging Dreyfus’s innocence would make the War Office collapse under the weight of public contempt. And the astounding outcome of this appalling situation was that the one decent man involved, Lt. Colonel Picquart who, alone, had done his duty, was to become the victim, the one who got ridiculed and punished. O justice, what horrible despair grips our hearts? It was even claimed that he himself was the forger, that he had fabricated the letter-telegram in order to destroy Esterhazy . But, good God, why? To what end? Find me a motive. Was he, too, being paid off by the Jews? The best part of it is that Picquart was himself an anti-Semite. Yes! We have before us the ignoble spectacle of men who are sunken in debts and crimes being hailed as innocent, whereas the honor of a man whose life is spotless is being vilely attacked: A society that sinks to that level has fallen into decay.
The Esterhazy affair, thus, Mr. President, comes down to this: a guilty man is being passed off as innocent. For almost two months we have been following this nasty business hour by hour. I am being brief, for this is but the abridged version of a story whose sordid pages will some day be written out in full. And so we have seen General de Pellieux, and then Major Ravary conduct an outrageous inquiry from which criminals emerge glorified and honest people sullied. And then a court martial was convened.
How could anyone expect a court martial to undo what another court martial had done?
I am not even talking about the way the judges were hand-picked. Doesn’t the overriding idea of discipline, which is the lifeblood of these soldiers, itself undercut their capacity for fairness? Discipline means obedience. When the Minister of War, the commander in chief, proclaims, in public and to the acclamation of the nation’s representatives, the absolute authority of a previous verdict, how can you expect a court martial to rule against him? It is a hierarchical impossibility. General Billot directed the judges in his preliminary remarks, and they proceeded to judgment as they would to battle, unquestioningly. The preconceived opinion they brought to the bench was obviously the following: “Dreyfus was found guilty for the crime of treason by a court martial; he therefore is guilty and we, a court martial, cannot declare him innocent. On the other hand, we know that acknowledging Esterhazy’s guilt would be tantamount to proclaiming Dreyfus innocent.” There was no way for them to escape this rationale.
So they rendered an iniquitous verdict that will forever weigh upon our courts martial and will henceforth cast a shadow of suspicion on all their decrees. The first court martial was perhaps unintelligent; the second one is inescapably criminal. Their excuse, I repeat, is that the supreme chief had spoken, declaring the previous judgment incontrovertible, holy and above mere mortals. How, then, could subordinates contradict it? We are told of the honor of the army; we are supposed to love and respect it. Ah, yes, of course, an army that would rise to the first threat, that would defend French soil, that army is the nation itself, and for that army we have nothing but devotion and respect. But this is not about that army, whose dignity we are seeking, in our cry for justice. What is at stake is the sword, the master that will one day, perhaps, be forced upon us. Bow and scrape before that sword, that god? No!
As I have shown, the Dreyfus case was a matter internal to the War Office: an officer of the General Staff, denounced by his co-officers of the General Staff, sentenced under pressure by the Chiefs of Staff. Once again, he could not be found innocent without the entire General Staff being guilty. And so, by all means imaginable, by press campaigns, by official communications, by influence, the War Office covered up for Esterhazy only to condemn Dreyfus once again. Ah, what a good sweeping out the government of this Republic should give to that Jesuit-lair, as General Billot himself calls it. Where is that truly strong, judiciously patriotic administration that will dare to clean house and start afresh? How many people I know who, faced with the possibility of war, tremble in anguish knowing to what hands we are entrusting our nation’s defense! And what a nest of vile intrigues, gossip, and destruction that sacred sanctuary that decides the nation’s fate has become! We are horrified by the terrible light the Dreyfus affair has cast upon it all, this human sacrifice of an unfortunate man, a “dirty Jew.” Ah, what a cesspool of folly and foolishness, what preposterous fantasies, what corrupt police tactics, what inquisitorial, tyrannical practices! What petty whims of a few higher-ups trampling the nation under their boots, ramming back down their throats the people’s cries for truth and justice, with the travesty of state security as a pretext.
Indeed, it is a crime to have relied on the most squalid elements of the press, and to have entrusted Esterhazy’s defense to the vermin of Paris, who are now gloating over the defeat of justice and plain truth. It is a crime that those people who wish to see a generous France take her place as leader of all the free and just nations are being accused of fomenting turmoil in the country, denounced by the very plotters who are conniving so shamelessly to foist this miscarriage of justice on the entire world. It is a crime to lie to the public, to twist public opinion to insane lengths in the service of the vilest death-dealing machinations. It is a crime to poison the minds of the meek and the humble, to stoke the passions of reactionism and intolerance, by appealing to that odious anti-Semitism that, unchecked, will destroy the freedom-loving France of the Rights of Man. It is a crime to exploit patriotism in the service of hatred, and it is, finally, a crime to ensconce the sword as the modern god, whereas all science is toiling to achieve the coming era of truth and justice.
Truth and justice, so ardently longed for! How terrible it is to see them trampled, unrecognized and ignored! I can feel Mr. Scheurer-Kestner’s soul withering and I believe that one day he will even feel sorry for having failed, when questioned by the Senate, to spill all and lay out the whole mess. A man of honor, as he had been all his life, he believed that the truth would speak for itself, especially since it appeared to him plain as day. Why stir up trouble, especially since the sun would soon shine? It is for this serene trust that he is now being so cruelly punished. The same goes for Lt Colonel Picquart, who, guided by the highest sentiment of dignity, did not wish to publish General Gonse’s correspondence. These scruples are all the more honorable since he remained mindful of discipline, while his superiors were dragging his name through the mud and casting suspicion on him, in the most astounding and outrageous ways. There are two victims, two decent men, two simple hearts, who left their fates to God, while the devil was taking charge. Regarding Lt Col Picquart, even this despicable deed was perpetrated: a French tribunal allowed the statement of the case to become a public indictment of one of the witnesses [Picquart], accusing him of all sorts of wrongdoing, It then chose to prosecute the case behind closed doors as soon as that witness was brought in to defend himself. I say this is yet another crime, and this crime will stir consciences everywhere. These military tribunals have, decidedly, a most singular idea of justice.
This is the plain truth, Mr. President, and it is terrifying. It will leave an indelible stain on your presidency. I realise that you have no power over this case, that you are limited by the Constitution and your entourage. You have, nonetheless, your duty as a man, which you will recognise and fulfill. As for myself, I have not despaired in the least, of the triumph of right. I repeat with the most vehement conviction: truth is on the march, and nothing will stop it. Today is only the beginning, for it is only today that the positions have become clear: on one side, those who are guilty, who do not want the light to shine forth, on the other, those who seek justice and who will give their lives to attain it. I said it before and I repeat it now: when truth is buried underground, it grows and it builds up so much force that the day it explodes it blasts everything with it. We shall see whether we have been setting ourselves up for the most resounding of disasters, yet to come.
But this letter is long, Sir, and it is time to conclude it.
I accuse Lt. Col. du Paty de Clam of being the diabolical creator of this miscarriage of justice - unwittingly, I would like to believe - and of defending this sorry deed, over the last three years, by all manner of ludricrous and evil machinations.
I accuse General Mercier of complicity, at least by mental weakness, in one of the greatest inequities of the century.
I accuse General Billot of having held in his hands absolute proof of Dreyfus’s innocence and covering it up, and making himself guilty of this crime against mankind and justice, as a political expedient and a way for the compromised General Staff to save face.
I accuse Gen. de Boisdeffre and Gen. Gonse of complicity in the same crime, the former, no doubt, out of religious prejudice, the latter perhaps out of that esprit de corps that has transformed the War Office into an unassailable holy ark.
I accuse Gen. de Pellieux and Major Ravary of conducting a villainous enquiry, by which I mean a monstrously biased one, as attested by the latter in a report that is an imperishable monument to naïve impudence.
I accuse the three handwriting experts, Messrs. Belhomme, Varinard and Couard, of submitting reports that were deceitful and fraudulent, unless a medical examination finds them to be suffering from a condition that impairs their eyesight and judgement.
I accuse the War Office of using the press, particularly L’Eclair and L’Echo de Paris, to conduct an abominable campaign to mislead the general public and cover up their own wrongdoing.
Finally, I accuse the first court martial of violating the law by convicting the accused on the basis of a document that was kept secret, and I accuse the second court martial of covering up this illegality, on orders, thus committing the judicial crime of knowingly acquitting a guilty man.
In making these accusations I am aware that I am making myself liable to articles 30 and 31 of the law of 29/7/1881 regarding the press, which make libel a punishable offence. I expose myself to that risk voluntarily.
As for the people I am accusing, I do not know them, I have never seen them, and I bear them neither ill will nor hatred. To me they are mere entities, agents of harm to society. The action I am taking is no more than a radical measure to hasten the explosion of truth and justice.
I have but one passion: to enlighten those who have been kept in the dark, in the name of humanity which has suffered so much and is entitled to happiness. My fiery protest is simply the cry of my very soul. Let them dare, then, to bring me before a court of law and let the enquiry take place in broad daylight! I am waiting.

With my deepest respect, Sir.
Émile Zola, 13th January 1898


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